Extrait de Jacky Legge, Le cimetière du sud à Tournai, 1995
(obligeamment transmis par la bibliothèque de Tournai, et transporté par la poste belge en pleine grève)
Un nouveau document confirme que l'implantation et la forme de l'oreille de Dutrieux ne correspondent pas à celle du barbu d'Aden, pas plus que ses moustaches tombantes : le médaillon figurant sur son tombeau.
Oreille de Révoil (vers 1881, cliché ici inversé), oreille du barbu d'Aden, oreille de Dutrieux
On sait qu'il existe un second portrait de Dutrieux. L’hypothèse Dutrieux repose sur la sidérante élimination de ce second portrait, forcément faux puisque « peu convaincant pour figurer sur la photographie d’Aden ». La gravure représentant Dutrieux publiée en 1886 représenterait en fait un autre explorateur belge, le docteur Maes !
J’étais donc à la recherche d’un portrait de Dutrieux et j’en trouvai un assez rapidement, un dessin, dans un ouvrage intitulé « De Zanzibar au lac Tanganyika », mais peu convaincant pour figurer sur la photographie d’Aden. Je m’apprêtais cependant à chercher d’autres portraits lorsque je fus contacté il y a quelques temps par un chercheur indépendant qui avait suivi le même raisonnement que moi et qui avait l’avantage d’avoir consulté à la Bibliothèque Nationale le portrait de Dutrieux, fort différent de celui que j’avais vu. En réalité, je me rendis compte à ce moment là qu’il y avait eu une erreur pour le dessin censé représenter Dutrieux qui n’est autre que celui du docteur Maes que l’on peut voir quelques pages avant [30 pages !] dans le même ouvrage ici. Faut-il le préciser ? C’est la photographie qui est authentique…
Rappelons que c’est ce raisonnement qui étaye l’idée de la présence de Dutrieux sur le cliché, SEUL ELEMENT CONCRET, présenté comme une "preuve", à partir duquel certains prétendent avoir réfuté définitivement la présence de Rimbaud sur la photo de l'Hôtel de l'Univers.
Or :
- On retrouve le portrait de Dutrieux dans sa biographie par Jadot (1950) et dans l'Illustration congolaise (1937) - reproduite ci-dessous. En bonne rigueur scientifique, ce portrait est donc beaucoup plus attesté que la photographie, qui n'a pas à être mise en doute a priori, mais n'est identifiée que par une simple mention manuscrite au dos.
- Le portrait de Maes figure dans le seul livre qui lui est consacré, et qui est visible en ligne. Ce livre a été publié dès 1879, un an après la mort de Maes, par sa famille. C'est un barbu coiffé en arrière, mais à part cela, il ne ressemble guère à Dutrieux.
Maes (1879) / Maes (1886)
- On retrouve le portrait de Dutrieux dans sa biographie par Jadot (1950) et dans l'Illustration congolaise (1937) - reproduite ci-dessous. En bonne rigueur scientifique, ce portrait est donc beaucoup plus attesté que la photographie, qui n'a pas à être mise en doute a priori, mais n'est identifiée que par une simple mention manuscrite au dos.
Le portrait gravé de Dutrieux est son portrait "officiel", le seul qui ait été publié, jusqu'à plus ample informé. Il a probablement été réalisé à partir d'une photographie prise en 1877 : avant de partir pour de longs voyages qui allaient leur apporter la gloire ou la mort, les explorateurs faisaient réaliser leur portrait photographique. Dutrieux était alors âgé de 29 ans ; il semble qu'à cette date son front n'ait pas été très dégarni...
L’oreille de Dutrieux présente le même lobe étroit sur les trois portraits connus. Cette oreille n’a rien de commun avec le barbu d’Aden, ni avec celle de Maes.
Comme le disait un grand spécialiste, citant Maupassant un peu à contresens :